Une guerre peut en cacher une autre

Journaliste au pôle Idées Temps de lecture: 3 min

Il faut avoir foi dans son bon droit et dans sa force pour s’engager ainsi franc battant dans la guerre, ce moment paroxystique dont nul ne ressort intact. En décidant hier de s’aligner aux côtés des Etats-Unis dans une série d’opérations menées contre Daesh en Irak, la Belgique a tenu à faire savoir qu’elle a bonne conscience.

Mais cette guerre est-elle légale ? Est-ce une guerre juste ? Est-ce la seule solution ?… Les questions que soulève tout conflit dans une démocratie bien faite n’ont semble-t-il pas mérité cette fois qu’on leur consacre de longs débats. L’énumération quotidienne des actes barbares commis par l’« Etat islamique » conjuguée au risque de voir Bagdad tomber entre ses mains paraît devoir tout justifier.

A des milliers de kilomètres de là, en Algérie, la décapitation de l’otage français Hervé Gourdel n’a fait que conforter ceux qui prônent l’urgence de se ruer en guerre. Que faire sinon agir ?

Mais l’art de la guerre, ce serait aussi « de soumettre l’ennemi sans combat », a écrit au VIe siècle avant J.-C. le général chinois Sun Tzu – qui en connaissait un bout en la matière. Deux millénaires et quelque plus tard, on est loin du compte. La solution militaire s’est imposée en Irak, en Afghanistan ou en Libye sans rendre le monde meilleur, loin s’en faut. Or voilà pourtant la Belgique prête à s’envoler vers un nouveau conflit qui ne résoudra pas l’instabilité maladive de la sous-région. Parce que la paix ne se gagne pas au seul son des canons, mais en collaborant durablement avec ceux que l’on a prétendu ainsi délivrer.

Au lieu de cela, le risque est pris ici de s’aliéner ces femmes et ces hommes qui, largement majoritaires de par le monde, veulent croire en un islam pacifique.

Cette nouvelle expérience guerrière pourrait nous valoir bien des drames. Demain, des F-16 belges prendront peut-être pour cible des… Belges. Des gars et des filles de Courtrai, Anvers ou Molenbeek que l’islam radical aura poussés dans l’ornière du djihadisme. Le droit sera sans doute du côté de nos soldats, mais notre société, elle, aura à prendre toute la mesure de son échec. L’échec d’une intégration ratée, le résultat de ce peu de perspectives qui pousse les amers et les révoltés à choisir les solutions extrêmes. Sans parler du risque de représailles au pays.

A l’heure où la suédoise se prépare à prendre des mesures sévères contre le radicalisme et le terrorisme, il est temps de songer aussi à réinvestir dans le vivre-ensemble. Par l’échange, l’école et le travail. Ce combat-là, six F-16 ne le gagneront pas. Il est pourtant fondamental pour les années et les décennies qui viennent. Pour la paix intérieure. Celle du pays. Et celle de tout un chacun.

 

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