Le Rwanda menace de renvoyer les réfugiés du Burundi vers d'autres pays

Le Rwanda a annoncé vendredi vouloir expulser les Burundais réfugiés sur son territoire vers d'autres pays au moment où Kigali est accusé de vouloir recruter dans les camps pour déstabiliser son petit voisin plongé dans une grave crise politique.

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Le Rwanda menace de renvoyer les réfugiés du Burundi vers d'autres pays
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Le Rwanda a annoncé vendredi vouloir expulser les Burundais réfugiés sur son territoire vers d'autres pays au moment où Kigali est accusé de vouloir recruter dans les camps pour déstabiliser son petit voisin plongé dans une grave crise politique.

"Le gouvernement rwandais a annoncé aujourd'hui (vendredi) qu'il allait immédiatement commencer à travailler avec les partenaires de la communauté internationale pour préparer, de manière ordonnée et sûre, le transfert des réfugiés burundais vers des pays tiers", selon un communiqué.

"Le Rwanda remplit sans hésiter ses obligations de protection des réfugiés. Cependant, l'expérience dans la région des Grands Lacs montre que la présence à long terme de réfugiés si près de leur pays d'origine, présente des risques considérables pour toutes les personnes concernées", a ajouté le texte du gouvernement.

La semaine dernière, des experts de l'ONU avaient accusé le Rwanda de recruter et d'entraîner des réfugiés du Burundi voisin afin de renverser le président burundais Pierre Nkurunziza.

Ces accusations ont été reprises mercredi par les Etats-Unis, qui ont reproché au Rwanda de chercher à "déstabiliser" le Burundi en enrôlant des réfugiés burundais dans une opposition armée contre le régime du président Pierre Nkurunziza.

Le gouvernement du Burundi a accusé à plusieurs reprises Kigali de soutenir des rebelles qui tentent de le renverser. Le Rwanda a rejeté ces accusations.

Quelque 75.000 Burundais ont trouvé refuge au Rwanda, dont 25.000 à Kigali, où se concentrent notamment hommes politiques, militants associatifs ou journalistes, menacés dans leur pays.

"L'indifférence totale aux cause profondes, bien connues, de l'instabilité au Burundi et de l'exode des réfugiés est troublante", a fustigé dans le communiqué la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo.

"Cela expose également les réfugiés à des menaces accrues de forces situées dans leur pays et compromet les efforts en faveur de solutions politiques durables".

"Pour le Rwanda, les risques croissants pour notre sécurité nationale et les malentendus sur notre politique étrangère sont inacceptables", a-t-elle ajouté.

Le Rwanda a souligné avoir demandé ces derniers mois à ses "partenaires internationaux et à des organisations d'accueillir les Burundais vivant dans des camps et des villes au Rwanda", sans réponse pour l'instant.

Le gouvernement rwandais n'a pas précisé qui était susceptible d'accueillir ces réfugiés.

Les autres pays de la région abritent déjà des milliers de Burundais dans des camps souvent bondés. La Tanzanie en recense 130.000, l'Ouganda 21.000 et la République démocratique du Congo 18.000.

Le Haut commissariat de l'ONU aux réfugiés (HCR), qui n'avait pas été averti, s'est d'abord dit "préoccupé" par l'annonce de Kigali "qui semble contredire la politique de protection des réfugiés suivie par le Rwanda depuis des décennies".

Le HCR a ensuite pu rencontrer des responsables rwandais et, a assuré l'agence de l'ONU, le gouvernement "va continuer à respecter ses obligations internationales de protection des réfugiés, ne vas pas fermer ses frontières et ne va pas expulser de force les réfugiés burundais".

Dans un communiqué, il presse le gouvernement burundais "à rendre publiques ces clarifications aussi tôt que possible pour éviter un mouvement de panique chez une partie des réfugiés au Rwanda".

Le Burundi est plongé dans une profonde crise politique depuis la candidature fin avril 2015 du président Nkurunziza - réélu en juillet - à un troisième mandat. L'opposition, la société civile et une partie de son camp jugent ce troisième mandat contraire à la Constitution et à l'Accord d'Arusha, qui avait mis fin à la guerre civile (1993-2006).

Les violences ont déjà fait plus de 400 morts et poussé plus de 240.000 personnes à quitter le pays, dont de nombreux opposants, militants associatifs et journalistes, selon l'ONU.

Face à la détérioration de la situation, l'Union européenne doit entériner lundi l'échec de ses consultations avec le Burundi sur les droits de l'homme et la démocratie et devrait annoncer une prochaine suspension de son aide directe à Bujumbura, a appris l'AFP vendredi de source diplomatique à Bruxelles.

Avec quelque 430 millions d'euros pour 2015-2020, l'UE est le premier donateur du Burundi.

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