Europe: les leaders désemparés

L’Europe est au bord de l’implosion. L’édito de Jurek Kuczkiewicz.

Chef du service Monde Temps de lecture: 3 min

L’espace Schengen ? « Le sauver est devenu une course contre la montre. » Ce froid constat n’est pas le fait d’un analyste quelconque, mais de Donald Tusk, le président du Conseil européen.

L’Union européenne ? « Elle peut se briser. Cela peut aller incroyablement vite, quand c’est l’isolation au lieu de la solidarité qui devient la règle interne et externe. » Là encore, ce n’est pas n’importe qui qui parle : c’est Jean Asselborn, le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères et de la Migration, qui préside actuellement aux travaux des conseils des ministres de l’UE.

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L’Europe en est là : au bord de l’implosion. On aimerait que les Cassandre se trompent. Mais le spectacle de la confusion qu’entraînent les décisions nationales face à l’afflux de réfugiés, et les divisions entre des dirigeants européens de plus en plus désemparés ne font que confirmer leurs prédictions.

Le citoyen préférerait toujours qu’il y ait des solutions simples et peu incommodantes à des problèmes complexes. Mais à défaut de solutions indolores, il attend de ses dirigeants qu’ils prennent les décisions difficiles. Et lorsque ces décisions ne sont pas prises, il veut savoir à qui adresser sa colère. Hélas, aujourd’hui en Europe, on ne sait pas à qui adresser sa réprobation. A Angela Merkel qui, après avoir été taxée d’égoïsme, l’a été pour avoir ouvert trop grand les portes aux réfugiés ? A François Hollande, qui attend prudemment que Merkel règle « ses » problèmes ? A Tsipras ou Renzi, qui n’auraient pas bien gardé leurs côtes et « gardé » leurs centaines de milliers de migrants ? Ou encore aux dirigeants de l’Europe de l’Est, qui ne voient aucune raison de renvoyer l’ascenseur de la solidarité dont ils ont bénéficié ?

Une crise de cette ampleur ne peut se résoudre par des décisions nationales et la ré-érection des frontières internes à l’Europe. « Le problème, confiait en privé le dirigeant d’une institution communautaire, est qu’il n’y a pas de centre de décision en Europe. Et c’est le résultat de la récupération du pouvoir par le Conseil européen (les Etats) à laquelle on a assisté ces dernières années. C’est tout le contraire de ce qu’avait voulu le Traité de Lisbonne. » Il est finalement étonnant d’entendre les revendications des nationalistes, voire de certains dirigeants européens, selon lesquelles les Etats géreraient mieux tout seuls cette crise. Mais c’est précisément le résultat de la gestion par les Etats que nous avons sous nos yeux !

On ne sait pas très bien qui pourrait apporter la solution, ni d’où. Et il est terrifiant de penser qu’il faudra peut-être un drame, une tragédie d’une ampleur suffisamment grande, pour que l’Europe, ses dirigeants comme ses citoyens, se ressaisissent.

 

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