Au Sablon, insaisissable Spilliaert
chez Patrick Lancz. On y admire un autoportrait de 1907, un phare dans la tempête de 1908 et quelques œuvres plus tardives aux lignes proches du style art déco…
Un Spilliaert peut en cacher un autre
Chez Patrick Lancz, l’étonnement est de mise : certaines des œuvres de Spilliaert proposées à la vente sont en effet pour le moins inattendues. Ainsi ce Pêcheur à la ligne et adolescents de 1912, qui frôle la caricature et rappelle que Spilliaert et James Ensor, tous deux Ostendais, se connaissaient bien. Il en va de même du Couple enlacé au bord de la mer, aquarelle de 1921 offrant l’heureuse vision d’un couple en maillot de bain au bord de l’eau, dont les fesses rebondies sont toutefois menacées par la présence d’un crabe dans leur dos. Cette composition récréative et optimiste contraste avec l’Autoportrait de 1907 (estimation 275.000 euros), sobre composition d’ombres et de lumières datant de la deuxième série des autoportraits de l’artiste – la plus aboutie. Le col blanc et dur souligne le regard fixe et inquisiteur, rehaussé par une chevelure en bataille. Autre étonnement, Le dirigeable de 1910, extrait d’une série d’illustrations réalisées par Spilliaert pour Robert Goldschmidt dans le cadre des essais en zeppelin effectués en Belgique entre 1909 et 1910. Ces 17 œuvres ne furent exposées qu’en 1927 à la galerie Georges Chiroux.
Volutes Art Déco
Parmi les œuvres plus tardives, on remarque une aquarelle sur papier de 1928 figurant L’enlèvement d’Europe (estimation : 135.000 euros) : si ce thème est généralement représenté avec passion et violence, Spilliaert le transforme en une rêverie romantique aux tons chauds et aux courbes douces, volutes décoratives évoquant le style art déco. Emmy au bain (1924, aquarelle, gouache, pastel et lavis à l’encre de Chine sur papier) montre une jeune femme dénudée sur un étonnant fond noir zébré d’étincelles et d’éclairs bleus et roses. Plus tardifs encore, une petite aquarelle très épurée figurant des tulipes stylisées dans un vase bleu sur un fond du même ton (1935) ainsi qu’un Paysage de rêve (1934), lavis à l’encre de Chine sur papier – technique privilégiée par l’artiste dans les années 1940, époque où Spilliaert a atteint la maturité nécessaire pour réduire les formes de la nature à des signes, revenant à une symbolique très simple, « de l’infini sous la matière ».
Léon Spilliaert, jusqu’au 22 novembre, Lancz Gallery, 15 rue Ernest Allard, 1000 Bruxelles, 0475-24.82.65, www.lanczgallery.be.