Les ambitions et le nouveau visage de Dragone
La société basée à La Louvière voit toujours plus grand. En Asie notamment. Découvrez pourquoi "The Han Show" stresse autant Franco Dragone.
- Publié le 02-10-2014 à 18h11
- Mis à jour le 02-10-2014 à 19h45
Ne dites "Franco Dragone Entertainment Group" mais tout simplement "Dragone". Le groupe, qui a vu le jour à La Louvière il y a 13 ans maintenant à l’initiative du créateur Franco Dragone, entend passer à une nouvelle étape de son développement. "Notre ambition, c’est d’évoluer de ce qui était à l’origine un atelier artisanal vers la plus belle compagnie de création culturelle au monde" , explique Yves Delacollette, président et Chief Spectator Officer de Dragone et qui, après une partie de sa carrière consacrée au secteur bancaire, a rejoint cette aventure artistique il y a un peu plus d’un an.
Le changement sémantique vise à montrer que Dragone est une entreprise qui dépasse la personnalité de son seul créateur. Le changement de nom a été accompagné d’un nouveau logo, d’un nouveau site Internet mais aussi d’un management renforcé.
Création artistique
"Au cœur de notre entreprise et de notre organisation, il y a la création artistique et culturelle. C’est ce qui nous différencie par exemple du Cirque du Soleil qui est reconnu pour être un producteur de spectacles" . Et d’ajouter : "Nous avons envie que la Wallonie devienne la Silicon Valley des arts du spectacle. Dragone a un rôle d’animation à jouer à ce niveau-là" .
L’ambition de Delacollette ? Faire de Dragone "le Pixar du spectacle vivant" . En s’appuyant sur des partenaires puissants comme le groupe chinois Wanda ou le français Sodexo qui eux prennent en charge les coûts financiers liés notamment à la construction des théâtres qui joueront les créations Dragone.
Les projets ne manquent pas pour l’entreprise louviéroise. Notamment en Asie, le poumon de la croissance de Dragone dans les années à venir en raison de l’explosion démographique, de l’urbanisation croissante mais aussi de l’émergence d’une classe moyenne importante. Il y aura d’abord en décembre prochain à Wuhan, ville de 11 millions d’habitants dans le centre de la Chine, le lancement très attendu du spectacle "The Han Show". Puis ce sera le Lido à Paris début 2015 avant un autre spectacle "Mysterious land of Happiness" à nouveau en Chine et toujours en 2015. Bref, trois méga-shows seront lancés dans les douze prochains mois. Puis les créations Dragone devraient s’arrêter à Dubaï (2016) et à Jakarta (2018). En plus du lancement d’une franchise mondiale "Taboo". "Entre 2000 et 2013, 15 millions de personnes à travers le monde ont vu des spectacles Dragone. Dans quelques années, nous serons à 10 millions par an" , ajoute Yves Delacollette.
Mais au fait combien "pèse" Dragone ? La question est délicate et nous n’obtiendrons pas de chiffres financiers précis sur le sujet. "Il ne faut pas perdre de vue que Dragone reste une PME" , justifie Delacollette. La PME - qui emploie directement environ 500 personnes - affiche un chiffre d’affaires qui flirte avec les 100 millions de dollars. Et l’entreprise est-elle rentable ? "Les années de vaches maigres sont derrière nous. Après plusieurs années de pertes, le groupe a affiché un bénéfice symbolique en 2013. La tendance est désormais clairement bénéficiaire mais nos marges restent modestes. Il ne faut pas oublier que nous devons attirer les meilleurs talents artistiques dans le cadre de nos projets et donc bien les rémunérer" , conclut Yves Delacollette.
Une course contre la montre en Chine
Franco Dragone n’a qu’une obsession : être prêt pour la première de "The Han Show".
Course contre la montre. Celle que Franco Dragone mène en Chine, à Wuhan précisément, pour être prêt dans les temps pour la grande première mondiale du spectacle "The Han Show" prévue le 20 décembre prochain.
Au sein du théâtre, le stress monte d’un cran et plusieurs centaines de personnes s’activent pour être prêtes le jour J. Car le théâtre, spécialement construit et conçu pour cette production Dragone, a été livré par le groupe chinois Wanda avec plusieurs mois de retard. Ce groupe, actif au départ dans la construction et l’immobilier et qui s’est diversifié ensuite dans la sphère culturelle en Chine, a mis sur la table 400 millions de dollars pour la construction du théâtre et la production du spectacle.
"Plus grand qu’un paquebot"
Quelques chiffres donnent la mesure du défi : un théâtre de plus de 2 000 places mobiles, près d’une centaine d’artistes sur scènes, le double de techniciens, des écrans géants de plus de 80 mètres carrés, des bras articulés de plusieurs tonnes, une piscine au cœur du spectacle de 10 millions de litres. La construction de l’édifice a mobilisé plusieurs milliers de travailleurs.
"Ce théâtre est plus grand qu’un paquebot ou qu’un A380. Chaque jour, je stresse un peu plus… Mais malgré cette taille, l’aspect technologique ne doit pas prendre le dessus sur la poésie du spectacle. Nous travaillons sur ce projet avec un acharnement qui confine parfois à la folie" , a expliqué Franco Dragone, en liaison téléphonique au cœur du théâtre depuis la Chine. "J’ai dit au patron du groupe Wanda : vous êtes le propriétaire de ce bateau mais moi je suis le capitaine. Ce ne sera pas un spectacle historique. Les grands réalisateurs chinois auraient été mieux placés que nous pour faire cela. Non, ce spectacle parlera de ce que vit la Chine aujourd’hui, de sa culture, de sa jeunesse, du mélange entre innovation et tradition. Notre rôle de bouffon est celui-là : pointer les contradictions et mieux comprendre les problèmes de la société chinoise" , a encore ajouté l’artiste qui dit vouloir "entreprendre les dix plus belles années de sa vie sur le plan créatif" .
Et la collaboration entre Dragone et le groupe chinois Wanda ne devrait pas s’arrêter là. Car les pourparlers entre les deux entreprises pourraient déboucher dans les années à venir sur d’autres spectacles, de trois à six dans différentes villes chinoises. Avec évidemment un rêve au sein de l’entreprise basée à La Louvière : monter une création à Pékin.