Cameron après Juncker: Brexit ou Camerexit?
Et il incarne le juste milieu du
complexe échiquier européen.
Un bottin ne suffirait pas à contenir les âneries, contre-vérités, et insultes déversées outre-Manche sur M. Juncker. On n’y a pas dégainé le seul point qui méritait la controverse : son rôle de défenseur acharné du paradis fiscal grand-ducal. Mais avec ses 60 propres paradis fiscaux qui irriguent la place financière londonienne, et une place luxembourgeoise qui lui a été utile aussi, voilà un argument superbement ignoré par le Royaume-Uni.
(Gageons qu’il se trouvera des voix pour cuisiner là-dessus M. Juncker lors de son audition au Parlement européen, à l’heure où l’évasion et l’évitement fiscaux constituent un enjeu majeur pour les finances des Etats.)
David Cameron et les siens disent que le choix de Juncker a rapproché leur pays d’une sortie de l’UE. C’est oublier que M. Cameron a entrouvert la porte en annonçant un référendum sur la question.
En réalité, avec la promesse de référendum puis sa croisade anti-Juncker, David Cameron a visé d’abord sa propre réélection en 2015, misant sur une posture thatchérienne du seul contre tous. Mais n’est pas Thatcher qui veut. Et l’Europe à 28 n’est plus le club cosy de l’Europe à 12. Son jeu a été d’une gravité considérable : il a créé le risque de « Brexit », pour éviter le « Camerexit ». Pourtant, en rentrant humilié de sa défaite européenne, M. Cameron s’est rapproché plus du second scénario que du premier.
Nombreux sont ceux, en Europe comme sur les Iles, qui aimeraient que les Britanniques tranchent une bonne fois pour toutes sur leur maintien dans une Union qui s’intégrera de plus en plus. Ce choix définitif est peut-être tentant. Mais il n’est pas du tout sûr que les Britanniques voudront l’affronter prochainement. Car ce sera jouer à la roulette russe avec l’avenir de leur prospérité.