FrancoFaune, un festival pour la chanson française
« Si on a quitté le format et changé de nom, c’est pour éviter le mot chanson française et justement pour la déringardiser, explique le directeur Florent Le Duc. Avec ce mot, on pense tout de suite à Brel, Barbara, Brassens ou à la variété comme Bénabar et Calogero. Pourtant, ce n’est pas difficile de trouver des groupes jeunes et modernes qui chantent en français en Belgique. »
Pas si difficile ? Demandez aux Francofolies de Spa. Né il y a vingt ans, le festival de musique et chanson françaises a depuis longtemps laissé tomber le combat. Il n’est plus rare de retrouver sur leur affiche des artistes adeptes de la langue de Shakespeare. Hooverphonic, Girls in Hawaii, Ghinzu, Noa Moon, Selah Sue, Puggy… En 2004, ils représentaient 10 à 12 % de leur programmation. En 2014, la proportion a grimpé à 20 %.
D’après Marc Radelet, l’attaché de presse du festival, il faut bien suivre l’actualité musicale. « On a la chance d’avoir une scène belge anglophone de qualité, on ne va pas leur fermer la porte par principe. La musique électro s’est anglophonisée, chez les Français aussi. Notre seul quota imposé est celui des 50 % d’artistes originaires de la Communauté française. »
Le problème, c’est qu’il est difficile de trouver parmi la faune francophone belge de grosses têtes d’affiche. Excepté Stromae, où sont les stars capables d’attirer les foules pour un concert ? « C’est un peu l’arbre qui cache la forêt, poursuit Florent Le Duc. Bien sûr, les Francofolies rétorquent qu’ils doivent avoir un certain nombre de personnes pour que le festival soit rentable et on ne peut pas le faire avec des artistes francophones belges.
Le français plus tendance depuis dix ans
Le vent serait en train de tourner lentement mais sûrement. Le chroniqueur musical au Soir Thierry Coljon remarque, dans son livre De Brel à Stromae. La grande histoire belge de la chanson française que l’arrivée du Liégeois Jeronimo a remis au goût du jour la pop francophone en Belgique. « En 2006, la maison de production PIAS a lancé le label 30 février et fait découvrir les groupes Eté 67, Saule, Saint André et Suarez. »
FrancoFaune suit cette nouvelle vague. L’équipe mettra en avant sur ces scènes quatorze découvertes pour la Biennale de la chanson française et les trois finalistes disputeront la finale le 13 décembre à Wolubilis. Le mot d’ordre pour gagner : des textes en français, et pas de yaourt ! Même si Florent Le Duc insiste : « O n n’est pas des ayatollahs. Il ne faut pas que cela devienne dogmatique. Ouvrons les portes de la francophonie. »
Festival FrancoFaune du 10 au 12 octobre à Bruxelles. Infos et tickets sur www.francofaune.be.
Trois jours pour créer douze titres
Comme mise en bouche avant le week-end, FrancoFaune reprend le concept du festival Les Nuits Secrètes. Pendant trois jours, trente musiciens issus de seize groupes belges et français, parmi lesquels Balimurphy, Li-Lo*, Marie Warnant, Vismets, Saule, My Little Cheap Dictaphone…, vont préparer douze titres inédits pour un concert d’une heure et demie au VK, samedi 4 octobre à 20h.
« D’habitude, Les Nuits Secrètes, c’est 70 % d’anglais et 30 % de français. Ici, on aimerait bien inverser la tendance », commente Florent Le Duc.
Au moins 30 % de français sur les ondes
A ceux qui se plaignent de la faible place de la chanson française belge à la radio, le CSA rappelle l’existence des quotas. Les radios privées doivent diffuser 4,5 % d’artistes issus de la Fédération Wallonie-Bruxelles et au minimum 30 % de chanson française. « Mais certaines radios font plus, selon Cédric Mauer, assistant à l’Unité radio du CSA. Bel RTL s’est engagée à passer 40 % de titres en français sur ses ondes et Sud Radio 50 %. »
Pour la RTBF, c’est différent. Les quotas sont répartis entre toutes les radios. Sur Classic 21 par exemple, le minimum descend à 15 % de musique francophone. « C’est normal, le rock et la pop sont majoritairement anglo-saxons et c’est justement notre créneau musical, explique le programmateur, Bernard Dobbeleer. Après Téléphone, Jean-Louis Aubert, Bashung, il y a de moins en moins de jeunes groupes qui chantent en français. Ce n’est pas facile pour nous. On passe quand même du Puggy, Dan San, Dandy Shoes… »
A Bel RTL, le programmateur, Thomas Simonis, est aussi ennuyé par ces quotas. « Pour les 4,5 % d’artistes de la communauté francophone, heureusement qu’on a Stromae et Puggy. On essaie de rester généraliste. Je ne vois pas qui d’autre correspondrait à notre audience. »
Et si les quotas sont impossibles à tenir, les radios préfèrent la nuit. Contrairement à d’autres pays européens, en Fédération Wallonie-Bruxelles, les œuvres peuvent être diffusées à toute heure.