Obama dit n'avoir aucune certitude que l'accord sur l'Ukraine sera appliqué
Un accord a été conclu jeudi à Genève pour une désescalade rapide des tensions en Ukraine entre les Etats-Unis, la Russie, l'Union européenne et l'Ukraine. Cet accord prévoit notamment le désarmement des groupes armés illégaux et l'évacuation des bâtiments occupés.
- Publié le 17-04-2014 à 11h30
- Mis à jour le 17-04-2014 à 22h43
Un accord a été conclu jeudi à Genève pour une désescalade rapide des tensions en Ukraine entre les Etats-Unis, la Russie, l'Union européenne et l'Ukraine. Cet accord, qui paraissait hors d'atteinte pour les diplomates avant la réunion, prévoit notamment le désarmement des groupes armés illégaux et l'évacuation des bâtiments occupés.
"Tous les groupes armés illégaux doivent être désarmés, tous les bâtiments saisis illégalement doivent être rendus à leurs propriétaires légitimes, toutes les rues, les places et les autres lieux publics dans les villes ukrainiennes doivent être libérés", indique le document.
La mission de surveillance de l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) sera chargée d'aider les autorités ukrainiennes à mettre en oeuvre ces mesures.
C'est le chef de la diplomatie russe, Sergei Lavrov, qui a le premier annoncé l'accord lors d' une conférence de presse alors que Moscou avait multiplié ces derniers jours les déclarations de fermeté, le président Vladimir Poutine lançant une nouvelle fois jeudi la menace voilée d'un recours à la force en Ukraine.
"Nous avons approuvé un document, la déclaration de Genève du 17 avril, dans lequel nous sommes d'accord sur la nécessité de prendre des mesures initiales concrètes pour obtenir une désescalade des tensions et pour assurer la sécurité de tous les citoyens ukrainiens", a déclaré M. Lavrov.
Obama reste prudent...
Le président des Etats-Unis Barack Obama a dit jeudi n'avoir aucune certitude que l'accord conclu sur l'Ukraine à Genève permette une désescalade sur le terrain et prévenu que d'autres sanctions américaines et européennes à l'encontre de Moscou seraient prises en cas d'impasse.
"Je ne pense pas qu'on puisse être sûr de quoi que ce soit à ce stade", a-t-il déclaré depuis la Maison Blanche. "La possibilité existe que la diplomatie puisse conduire à une désescalade de la situation", a-t-il ajouté, tout en prévenant qu'Américains et Européens renforceraient les sanctions existantes contre la Russie si aucune avancée n'était enregistrée en Ukraine.
"Un premier pas important", selon Berlin
Le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier a jugé jeudi que l'accord de Genève sur une désescalade des tensions en Ukraine était "un premier pas important" mais que "beaucoup d'autres" devaient encore suivre.
"C'est un premier pas important mais beaucoup d'autres doivent encore suivre", a-t-il affirmé sur la première chaîne de télévision publique ARD.
"La paix n'est pas encore gagnée nous sommes encore loin du but", a-t-il ajouté. "Mais au moins la chance est là que l'Ukraine maintienne son unité", selon lui.
"L'OSCE doit jouer un rôle dirigeant"
La diplomate en chef de l'Union européenne Catherine Ashton, qui représentait l'UE à ces discussions quadripartites, a souligné que "l'OSCE doit jouer un rôle dirigeant" dans l'application de l'accord, dont le texte prévoit que les Etats-Unis, l'UE et la Russie sont prêts à fournir des observateurs.
Le document qui a été adopté prévoit aussi une amnistie pour ceux qui respecteront les dispositions de l'accord, à l'exception de "ceux qui sont coupables de crimes de sang".
La Russie n'a "aucun désir" d'envoyer des troupes en Ukraine, a affirmé M. Lavrov devant la presse. "Nous n'avons aucune espèce de désir d'envoyer des troupes en Ukraine. Cela serait contre nos intérêts fondamentaux", a dit le chef de la diplomatie russe.
Le secrétaire d'Etat américain John Kerry, tout en se félicitant de la conclusion de l'accord, a mis en garde Moscou. "Si nous ne voyons pas de progrès, alors nous n'aurons pas d'autre choix que d'imposer plus de sanctions", a-t-il lancé.
Interrogé sur la position de Washington sur la Crimée, rattachée en mars à la Russie, M. Kerry a souligné : les Etats-Unis "n'ont pas renoncé mais nous ne sommes pas venus (à Genève) pour parler de la Crimée".
Mme Ashton a assuré pour sa part que l'Union européenne "allait continuer ses efforts pour soutenir l'Ukraine, économiquement, financièrement et politiquement".
L'accord adopté à Genève stipule aussi que le processus constitutionnel annoncé par le gouvernement transitoire ukrainien sera "transparent", "avec l'établissement d'un large dialogue national, pour inclure toutes les régions ukrainiennes et toutes les entités politiques".
Les tensions restent fortes
Le secrétaire d'Etat américain s'est insurgé jeudi après des informations faisant état de l'obligation pour des juifs ukrainiens de s'enregistrer en tant que tels dans une ville de l'est de l'Ukraine, en proie à des troubles."C'est non seulement intolérable, c'est grotesque. C'est au-delà de l'inacceptable", a-t-il martelé.
Les tensions sur le terrain restent très fortes. Des affrontements qui ont fait trois morts ont opposé dans la nuit de mercredi à jeudi insurgés pro-russes et loyalistes au pouvoir de Kiev.
Lors d'une longue séance télévisée de questions-réponses, le président Poutine a fait monter les enchères, avertissant qu'il "espère fortement" ne pas être "obligé de recourir" à l'envoi de ses forces armées en Ukraine.
Le chef du Kremlin a exhorté les autorités ukrainiennes à accepter le "dialogue", via les entretiens quadripartites de Genève, au risque de mener le pays vers le "gouffre". Il a également qualifié de "foutaises" les affirmations selon lesquelles les forces russes seraient impliquées dans les troubles dans l'Est de l'Ukraine. M. Poutine a encore réclamé des "garanties" pour les droits des populations russophones de ces régions orientales ukrainiennes.
Américains et Européens avaient en outre prévenu que, faute de solution diplomatique à Genève, ils se préparaient à durcir leurs sanctions contre la Russie.
Chaque fois que la Russie prendra des mesures destinées à déstabiliser l'Ukraine et à violer sa souveraineté, il y aura des conséquences", a répété le président Barak Obama sur CBS News. Les Russes "ont -- au minimum -- soutenu des milices non étatiques dans le sud et l'est de l'Ukraine", a-t-il accusé.
Le président français François Hollande a renchéri jeudi, prévenant que l'UE envisageait d'étoffer ses sanctions en cas d'échec à Genève. Il a eu des consultations jeudi avec la Chancelière Angela Merkel et avec le Président du Conseil Européen, Herman Van Rompuy.
L'engagement de la Russie à Genève "sera un test, on verra si la Russie veut aider à la stabilité de cette région", a de son côté estimé à Genève le chef de la diplomatie ukrainienne Andrii Dechtchitsa. "Il est important que ces mesures commencent à être appliquées (...)et les deux ou trois prochains jours, a-t-il estimé, seront cruciaux".
Crédit photo : AP
Edward Snowden fait une intervention surprise à la séance de questions/réponses de Poutine
L'ex-consultant de l'Agence américaine de sécurité (NSA) Edward Snowden, réfugié en Russie, a fait une intervention inattendue à la séance annuelle de questions-réponses du président russe Vladimir Poutine, l'interrogeant sur la surveillance en cours en Russie.
Alors que la séance, diffusée sur la chaîne Pervyi Kanal, durait déjà depuis près de deux heures, la présentatrice du programme a tout à coup annoncé une question "inattendue, voire sensationnelle, d'une personne ayant mené une véritable révolution de l'information".
"C'est justement ce dont on a besoin", a alors ironisé Vladmir Poutine, avant que n'apparaisse sur fond noir Edward Snowden, ancien consultant de la NSA à l'origine de multiples révélations sur le système de surveillance des Etats-Unis et depuis réfugié en Russie.
"J'aimerais vous demander: est-ce que la Russie intercepte, stocke ou analyse d'une quelconque façon les communications de millions d'individus?", a-t-il lancé.
Le président russe a semblé surpris par la question, posée en anglais, alors qu'il ne disposait pas d'une traduction en simultané.
"L'anglais américain est un peu différent", a-t-il commenté, attendant pour répondre que le présentateur, hésitant, répète la question en russe.
"Cher M. Snowden, vous êtes un ancien agent, et j'ai eu des liens avec les services de renseignement, alors je vais vous parler dans le langage des professionnels", a déclaré le président, ancien membre du KGB soviétique, sous les applaudissements du public.
"Nous avons un règlement juridique strict concernant l'utilisation par les services spéciaux de ces moyens, notamment des écoutes téléphoniques et de la surveillance sur internet", a-t-il expliqué.
"C'est pour cela qu'(une surveillance) aussi massive et aveugle ne peut pas exister" en Russie, a-t-il affirmé.
Cependant, il a précisé que les services spéciaux utilisaient "les moyens modernes appropriés" pour surveiller les "criminels, y compris les terroristes".
L'Ukraine interdit l'entrée des Russes de 16 à 60 ans sur son territoire
La compagnie aérienne russe Aeroflot a indiqué jeudi avoir reçu un "avis officiel" du gouvernement ukrainien interdisant l'entrée sur le territoire de ce pays à tout homme russe de 16 à 60 ans.
"En accord avec un avis officiel reçu par la compagnie, tous les citoyens russes de sexe masculin âgés de 16 à 60 ans sont interdits d'entrée en Ukraine", a indiqué Aeroflot, la principale compagnie aérienne russe.
Sont aussi interdits d'entrée sur le territoire ukrainien les hommes ukrainiens âgés de 16 à 60 ans et les femmes ukrainiennes âgées de 20 à 35 ans "domiciliés sur le territoire de la République autonome de Crimée et de la ville de Sébastopol", a signalé la compagnie aérienne.
"Dans le cadre de l'opération anti-terroriste, (...) l'Ukraine prend des mesures afin de limiter l'accès à son territoire aux personnes indésirables", a confirmé à l'AFP le porte-parole des gardes-frontières ukrainiens Sergueï Astakhov.
Aeroflot recommande aux passagers concernés par les nouvelles mesures "de s'abstenir temporairement de voyager en Ukraine".