SNCB: la CGSP menace d’une grève fin février

La CGSP veut que la ministre des transports mette tous les partenaires du rail autour d’une table. Les cheminots estiment que le Groupe SNCB va perdre 1.200 emplois en 2015.

Journaliste au pôle Planète Temps de lecture: 6 min

Les deux principaux syndicats du rail ont décidé de retourner s’asseoir à la table des négociations sociales, la « commission paritaire nationale » du Groupe SNCB, où se discutent les grands dossiers ferroviaires. Ils en avaient claqué la porte fin octobre, après avoir découvert, dans la presse, que Jo Cornu, patron de la SNCB, estimait que le personnel bénéficiait de trop de congés. Le 2 février, ce sera donc un retour peu glorieux puisque Jo Cornu n’a pas varié ses déclarations d’une ligne. Et qu’il faudra dorénavant démontrer l’intérêt et l’efficacité de la politique de la chaise occupée quand celle de la chaise vide n’a rien rapporté, si ce n’est une direction aujourd’hui convaincue de pouvoir s’en passer…

« Il y a plein de choses qui se décident et on n’est plus au courant de rien. Si on y retourne, ce n’est pas pour faire de la figuration, c’est pour se faire entendre  », assure Michel Abdissi, le président des cheminots CGSP. À la moindre dérive de la part de Jo Cornu, on mettra la pression. On n’a plus rien à perdre. Par ailleurs, maintenant, le comité de pilotage, un autre organe de concertation, est présidé par Luc Lallemand, le patron d’Infrabel. On espère qu’avec lui, ça va changer : avec Cornu, on n‘avait ni retour ni solution aux dossiers que nous évoquions. » « Si Cornu croit qu’il a engrangé une victoire, c’est une victoire à la Pyrrhus. Il avait droit à dix cartouches, il les a toutes utilisées d’un coup, il n’a plus droit à la moindre erreur », enchaîne Serge Piteljon, le secrétaire national.

Le dialogue social semble n’être qu’une facette des craintes qui animent les troupes de la CGSP. Outre les gros problèmes de recrutement et des dossiers sensibles, ils ont l’impression que c’est tout le rail qu’on s’applique à détricoter. Une impression qui ne s’effacera pas si une paix sociale est obtenue au niveau interprofessionnel national. « Les attaques sur la caisse des soins de santé qu’on veut nous retirer, les pensions qu’on veut faire passer au SPF, le recrutement qu’on limite faute de moyens, c’est la raison d’être de HR-Rail, la filiale sociale commune de la SNCB et d’Infrabel. Un lieu qui garantit l’unicité de l’entreprise et des statuts. C’est un cordon ombilical entre tous les cheminots. Si on ne l’alimente plus, soit il tombe parce qu’il est séché, soit on le coupe », résume Michel Abdissi. Sans oublier les économies que la direction entend imposer partout. « Sauf quand il s’agit de reprendre comme consultant un directeur général atteint par la limite d’âge, et pourtant remplacé par quelqu’un d’autre. Là, on ne compte pas les dizaines de milliers d’euros que ça coûte… »

Autant de sujets qui poussent la CGSP à réclamer « que la ministre de la Mobilité mette en place un lieu de réflexion, une table ronde où direction, HR-Rail, syndicats et ministre, abordent les gros dossiers et expliquent leur analyse », poursuit M. Abdissi. « Elle en profitera pour nous expliquer comment elle compte réaliser tout ce qu’elle promet, l’augmentation de la sécurité, de la ponctualité, la lutte contre l’effet de serre, le maintien du statut unique des cheminots prévu dans l’accord gouvernemental, etc., tout en rabotant la dotation jusqu’en 2019. On aimerait qu’elle nous explique ce petit miracle de relever tous ces défis avec moins de moyens. »

Raisonnable de compter sur une ministre libérale qui n’a de cesse de répéter qu’elle ne se mêle pas de négociations sociales ? « Si nous n’avons pas de réunion avant le 23 février, nous déposerons un préavis de grève pour la dernière semaine de février ». En langage social, voilà qui s’appelle un ultimatum.

 

Social

Une mutuelle trop onéreuse ?

L’attaque vient de députés N-VA. Ils proposent de supprimer la « mutuelle » des cheminots et de la verser dans le système général. Argument : les frais d’administration des affiliés du rail (226 euros par titulaire en 2011) sont plus élevés que ceux d’autres mutuelles (moyenne de 118). D’autres prétendent que c’est parce qu’elle est garnie d’une réserve de plus de 60 millions d’euros qui fait des envieux dans le budget ferroviaire. La CGSP plaide que la caisse des soins de santé ferroviaire coûte plus cher, avant tout parce que ses 78.086 affiliés deviennent de plus en plus âgés, que le nombre de pensionnés ne cesse d’augmenter alors que le nombre de cheminots actifs ne cesse de diminuer. Mais aussi que les services qu’elle propose dépassent le service minimum des autres mutuelles en termes de services (crèches, garderies), d’assurance hospitalisation ou de remboursements de médicaments. Par ailleurs, ajoutent d’une même voix CSC-Transcom et CGSP, la caisse des cheminots est prévue et inscrite dans différentes lois, elle est un des ferments de l’unicité du statut des cheminots inscrit dans l’accord gouvernemental.

 

Recrutement

1.200 cheminots en moins en 2015 ?

C’est la CGSP-Cheminots qui fait le calcul. « Il n’y a plus, actuellement, que 33.500 salariés au groupe SNCB. Normalement, depuis quelques années, on ne recrute environ que 2.000 personnes par an pour remplacer les 3.500 qui partent naturellement. Les mesures d’économie budgétaire imposées par le gouvernement obligent les directions de la SNCB et d’Infrabel à réaliser des économies. Infrabel a déjà décidé de ne recruter que 300 postes dans les métiers en pénurie alors qu’il y aura 850 départs. Or, en 2015, au total du groupe, on prévoit environ 4.000 départs naturels, 500 de plus que les années précédentes. L’un dans l’autre, il y aura encore au moins 1.200 cheminots en moins à la fin de l’année. Et ainsi de suite les années suivantes. On sera vite moins de 30.000. On fera comment pour relever les défis qu’on n’arrête pas de nous lancer ? Parallèlement, on multiplie le recours aux contractuels, aux consultants, ou même aux consultants qu’on reprend ensuite comme contractuels. Et chaque fois qu’on pose une question pour savoir comment on va faire, la seule réponse qu’on nous donne c’est qu’il faudra faire preuve d’imagination. »

 

Front commun

CSC-Transcom : reprendre le dialogue est nécessaire

Les instances de la CSC-Transcom ont également décidé, mercredi, de retourner à la table des négociations syndicales (commission paritaire nationale). « Au terme de débats intenses, explique Isabelle Bertrand, la permanente nationale. Plusieurs tendances se sont exprimées mais, tous, finalement, avons estimé qu’une reprise du dialogue social était nécessaire ». D’autant plus, selon le syndicat chrétien, quand le patron de la SNCB « semble n’être qu’un pion placé là uniquement pour assure les impératifs du gouvernement et qui se croit au-dessus des organes paritaires. Il va quand même falloir qu’il revoie sa copie et, c’est vrai, après l’échec de la chaise vide, que nous trouvions aussi d’autres leviers pour faire entendre nos arguments. Mais il est impératif de retourner à la table de négociation. Pendant que nous n’étions pas là, Jo Cornu continuait à prendre des décisions qui avaient un impact direct sur les conditions de travail, sur l’arrêt des recrutements, des essais de light-train circulant sans accompagnateurs… »

 

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