Les secrets d’Albus Dumbledore portés à l'écran avec Jude Law
- Publié le 14-11-2018 à 11h54
- Mis à jour le 14-11-2018 à 13h05
L’univers d’Harry Potter s’élargit avec plus de spectacle et moins de magie.1927. Après les événements contés dans Les animaux fantastiques, le sorcier Grindelwald (Johnny Depp) s’échappe. A Londres, Norbert Dragonneau (Eddie Redmayne) refuse d’intégrer les Aurors, qui traquent les mages noirs, malgré l’insistance de son frère Thésée (Callum Turner) et de Leta Lestrange (Zoë Kravitz). Mais Albus Dumbledore (Jude Law) le pousse à se rendre à Paris, sur les traces de Tina (Katherine Waterston), de Grindelwald et de Croyance (Ezra Miller), que se disputent les forces du Bien et du Mal.
Faire du Harry Potter sans Harry Potter : c’est le défi de cette franchise. En l’espèce, ce n’est pas la plus scandaleuse des spin-offs. Sans doute parce qu’à la manœuvre on retrouve J.K. Rowling, qui veille sur son univers, David Yates, réalisateur de la saga depuis Harry Potter et l’Ordre du Phénix, et le producteur de toutes les adaptations, David Heyman.
Le parfum du monde des sorciers flotte encore, mais le charme opère moins. Comme toutes les excroissances cinématographiques, celle-ci pâtit de la surenchère d’effets visuels. Leur omniprésence est accentuée par la nécessité de recréer le Londres et le Paris de 1927. Il n’y a plus de filtre entre le monde des Moldus et celui des magiciens : ils ne sont que filtres numériques… Si de belles idées existent (les voiles noirs qu’utilise Grindelwald pour convoquer ses séides), certaines séquences ne sont là que pour en mettre plein la vue.
Lorsque le film revient brièvement à Poudlard pour des scènes intimistes, on retrouve des sentiments, des lumières naturelles, des personnages qui vibrent, bref de l’émotion.
Il manque surtout un vrai personnage central. Norbert est un héros récalcitrant et ses animaux fantastiques ne sont là que pour la galerie. L’antagonisme est moins entre lui et Grindelwald, qu’entre ce dernier et Dumbledore. Cet épisode aurait d’ailleurs pu s’intituler Les secrets de Dumbledore.
A l’opposé d’un Depp peu inspiré, Jude Law compose un jeune Dumbledore complexe. La nature profonde de ses rapports avec Grindelwald ("plus qu’un ami") fera gloser. Mais J.K. Rowling est prisonnière de son œuvre : elle ne peut (trop) réécrire l’histoire du futur directeur de Poudlard, telle que contée dans les Harry Potter.
De même, Tina s’impose moins que Leta Lestrange, belle figure hantée par son passé. Zoë Kravitz s’en empare si bien qu’on regrette qu’elle n’occupe pas une place plus importante.
Croyance dispose tout autant d’un potentiel. Mais cet orphelin évoque trop Voldemort et Harry. Et ses origines révélées sont déjà une audacieuse liberté par rapport aux annales futures (dont il est absent). L’apport le plus intéressant concerne Nagini (Claudia Kim), future créature de Voldemort, qui y gagne une épaisseur poignante - mais aussi fugace.
Sous le spectacle parfois tape-à-l’œil affleure donc encore le talent de J.K. Rowling. Mais comme la troupe de cirque magique croisée à Paris, une fois le rideau tombé, seules quelques étincelles flottent dans l’air, quand la marque d’Harry s’imprimait durablement.
Réalisation : David Yates. Avec Eddie Redmayne, Johnny Depp, Katherine Waterston,… 2h14.