Zimbabwe : le président Mugabe démissionne, scènes de liesse à Harare, Mnangagwa devrait être président par intérim
- Publié le 21-11-2017 à 16h52
- Mis à jour le 22-11-2017 à 10h49
Mnangagwa est attendu ce mercredi au pays.
Le président de l'Assemblée nationale zimbabwéenne, Jacob Mudenda, a annoncé mardi après-midi que le chef de l'Etat, Robert Mugabe, avait remis "formellement (s)a démission de président de la République du Zimbabwe avec effet immédiat". Applaudissements, cris de joie et concerts de klaxons ont accueilli cette annonce à Harare.
Après 37 ans au pouvoir - d'abord comme Premier ministre, puis comme chef de l'Etat - et une semaine de pressions, Robert Mugabe a accepté mardi après-midi de démissionner. Sa lettre de démission a été lue sous les applaudissements des élus par le président de l'Assemblée nationale. Cette dernière était réunie conjointement avec le Sénat pour lancer la procédure de destitution du chef de l'Etat, tandis que des manifestants, à l'extérieur du bâtiment, appelaient le Président nonagénaire à s'en aller "maintenant" et que d'autres marches étaient annoncées pour ce mercredi dans le même but.
A quoi a-t-il cédé?
Robert Mugabe avait résisté aux pressions de son armée, qui l'avait mis en résidence surveillée depuis mardi dernier; à celles des anciens combattants - dont il était - l'appelant à partir; au retournement de son parti, la Zanu-PF, qui après l'avoir désigné fin 2016 comme son candidat à la présidentielle de 2018, l'a remplacé le week-end dernier par l'ex-vice-Président Emmerson Mnangagwa; aux appels à démissionner de ce dernier, dont l'éviction, le 6 novembre, avait poussé les militaires à un coup de force et à arrêter Grace Mugabe, la trop ambitieuse épouse du vieux Président, qui voulait lui succéder après sa mort.
On ne sait encore ce qui a poussé le chef de l'Etat à finalement accepter ce qu'il refusait avec tant d'obstination jusque-là. Alors que certaines sources gouvernementales affirmaient ces derniers jours que M. Mugabe ne se rendait "pas complètement compte" de ce qui arrivait et entendait agir encore en chef de l'Etat, la plupart des membres du gouvernement ont boycotté le conseil des ministres convoqué pour mardi par le nonagénaire; cela a-t-il fait sur lui l'effet d'un électro-choc? Ou faut-il trouver dans son attitude la satisfaction de ses exigences? On sait qu'il réclamait l'immunité pour lui et son épouse et la possibilité pour eux de conserver leurs propriétés, acquises pour partie avec l'argent de l'Etat.
Achever le mandat
Selon la Constitution zimbabwéenne (article 100), si le Président n'est plus en position d'assumer ses fonctions, il doit être remplacé par le premier vice-Président qui, avec des pouvoirs réduits, termine son mandat. Le premier vice-Président était Emmerson Mnangagwa; on ignore encore si l'armée a obtenu sa réintégration dans ses fonctions.
Si ce n'est pas le cas, c'est le deuxième vice-Président qui doit assurer l'intérim présidentiel. Ce deuxième vice-Président, Phelekeza Mphoko, était un partisan de Mme Mugabe. Comme on sait que les partisans de "Disgrace" Mugabe l'étaient parce qu'elle avait le vent en poupe auprès de son vieux mari, dont elle faisait ce qu'elle voulait, et non en raison d'un programme politique particulier, il est possible qu'il rejoigne la majorité de la Zanu-PF, aujourd'hui résolumment opposée aux Mugabe.
Mnangagwa devrait être nommé vendredi président par intérim du Zimbabwe
"L'investiture du camarade Mnangagwa est prévue vendredi", affirme le site du groupe audiovisuel public ZBC. En exil depuis son éviction du pouvoir, l'ancien vice-président, 75 ans, doit arriver à Harare mercredi à 18h00 (17h00 heure belge), précise la ZBC alors que son retour était précédemment fixé à 13h00 (midi heure belge).
Washington voit dans le départ de Mugabe une "opportunité historique"
Le départ du président Robert Mugabe est une "opportunité historique pour les Zimbabwéens" et leur volonté d'en finir avec "l'isolement du Zimbabwe", a déclaré mardi le département d'Etat américain. "Le Zimbabwe a une opportunité extraordinaire d'emprunter une nouvelle voie", a estimé le chef de la diplomatie américaine Rex Tillerson dans un communiqué, saluant un "moment historique".
"Nous félicitons tous les Zimbabwéens qui ont fait savoir pacifiquement mais clairement que l'heure du changement était arrivée", a-t-il ajouté. Il a appelé "toutes les parties" à "la retenue et au respect de l'ordre constitutionnel et civil".
Au-delà de la période de transition qui s'ouvre, "les Zimbabwéens devront choisir leurs propres dirigeants" par "des élections libres et équitables", a insisté le secrétaire d'Etat, souhaitant la mise en place de réformes économiques et politiques.
Le président Mugabe, 93 ans dont 37 passés au pouvoir, a mis un point final mardi à son règne sans partage sur le Zimbabwe en présentant sa démission sous la pression de l'armée, de son propre parti et de la rue. Son ancien vice-président Emmerson Mnangagwa, 75 ans, devrait être nommé dès mercredi président par intérim.