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L’œil et la chance

Chez Quai 4, Emile Desmedt expose ses nouvelles créations en verre et en terre. Une poétique de l’accident maîtrisé.

Temps de lecture: 4 min

Céramiste originaire de Tournai (1956-), longtemps professeur à l’académie des beaux-arts de cette ville, Emile Desmedt est connu du public liégeois pour trois œuvres disséminées dans l’espace urbain – Musée en plein air du Sart-Tilman, ancien Hôpital des Anglais et place Saint-Etienne.

A l’aube des années 2000, la Région wallonne a fait appel à lui pour une intégration artistique originale, installée en extérieur lors de la rénovation du bâtiment de l’ancien Hôpital des Anglais : une expression libre sur le thème du cadran solaire, composée à partir d’un cône en acier inoxydable et d’un miroir en acier poli, percé en son centre d’un mât de 8 mètres de haut maintenu par une série de tendeurs, également en acier. Pour cette œuvre magistrale, le sculpteur avait pu compter sur la collaboration technique du bureau d’études Greisch.

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Venu de la céramique et des arts du feu, lui-même enseignant dans ces disciplines, Desmedt est devenu un sculpteur à part entière, investi dans une multitude de compositions associant divers matériaux ou se déclinant sur un seul d’entre eux : céramique, bois, béton, papier-porcelaine, cuivre, acier, plomb, étain, etc. Il fait partie de ces artistes exigeants, qui travaillent continuellement sur la métamorphose des formes sculpturales autant que des matériaux qui les composent. Présent dans de nombreuses collections privées ainsi qu’au Centre Keramis à La Louvière avec un « four-sculpture » monumental créé dans le cadre de Mons 2015, ce sculpteur de terre et de feu expose aujourd’hui ses œuvres récentes en terre et en verre, couvrant la période 2015-2019. Une première collaboration avec la galerie de Cécile Servais, en bord de Meuse.

Cocons de verre et de terre

Multipliant au fil du temps les expérimentations techniques, l’homme a l’intelligence de ne pas aller contre les nombreux – et inévitables – accidents qui se produisent en cours de production des pièces. Il préfère au contraire les intégrer à son travail en cours : « Tout est accident. Certaines cicatrices, fêlures, cassures, sont le fruit du hasard pendant la cuisson, et j’ai ensuite réussi à les détourner, à les récupérer. J’abandonne souvent mon idée de départ, je change de direction en cours de route, je reste dans la même sémantique, le même concept, mais je laisse le hasard faire son travail, c’est ça qui m’intéresse, explique-t-il. Le principe de cuisson évolue chaque fois et c’est ça qui me permet de continuer à prendre du plaisir. Je profite de la technique pour expérimenter. C’est à la fois l’œil et la chance. »

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Cocon

Exploitant depuis vingt ou trente ans le même concept, Desmedt multiplie les techniques pour questionner inlassablement la métaphore du cocon : l’imago est le terme scientifique qui désigne la chrysalide, le cocon, et appelle donc un « à-venir » dans la composition et l’évolution de la pièce. Sa position semble instable et peut suggérer, alors même que la pièce est particulièrement lourde, une sorte de fragilité, accentuée par une fissure qui s’élargit en son sommet… « L’imago, ça me vient de loin, c’est un état de perfection de l’insecte encore dans son cocon. C’est l’énergie intérieure avant qu’il soit libéré : il est encore contenu dans sa carapace, c’est l’instant juste avant l’éclosion, la révélation. »

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Pour cette exposition en solo, l’homme a finalisé certaines pièces qui dormaient dans l’atelier depuis dix ans : « J’ai plus de plaisir à découvrir comment faire les choses qu’à produire en nombre. Les deux disques noirs au mur, je cherche depuis longtemps comment les façonner ; j’ai construit un four dans l’atelier exprès ! Quinze jours de travail pour ces deux seules pièces. »

Explorateur insatiable, Desmedt travaille aussi bien l’inox que le plomb fondu, la pierre à savon, le cristal, les billes de verre (polies ou non) et des alliages inédits. Il n’emploie que très peu de pigments, préférant que ce soient les principes de cuisson qui modifient les teintes des œuvres – enfumage, cuisson au sel et au charbon…

« Emile Desmedt. Last but not least », Quai 4 Galerie, jusqu’au 13 avril, du jeudi au samedi de 14 h 30 à 18 h 30 ou sur rendez-vous, 4 Quai Churchill, 4020 Liège, galerie@quai4.be, www.quai4.be

 

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