Sur la piste de Bernard Heuvelmans, le Belge chasseur de yéti et autres créatures énigmatiques
- Publié le 20-03-2018 à 17h08
- Mis à jour le 22-03-2018 à 11h21
Il a inspiré Hergé, Henri Vernes et des générations de scientifiques, mais son nom est quasi-inconnu de ses compatriotes. Le Belge Bernard Heuvelmans, zoologue de formation, portant beau avec sa moustache et ses biceps, fut une star de la science et de la télévision des années 60. Avant de connaître une chute irrémédiable et de décéder, au ban de la communauté scientifique, en 2001. C’est ce parcours étonnant que le journaliste David Deroy retrace dans son documentaire “Rebelle de la science”, diffusé ce 23 mars à 22 heures 55 sur La Une. Tout se joue autour des années 50, où les zoologistes s’attaquent aux derniers sanctuaires encore inexplorés de la planète. “Né zoologiste”, comme il le dit lui-même - “je faisais déjà des classifications des espèces de singes à 6 ou 7 ans” - Bernard Heuvelmans la trentaine à cette époque, est déjà un scientifique reconnu : diplômé de l’ULB, il avait ainsi résolu le mystère de l’oryctérope, ce fourmilier africain aux dents étranges, qu’il décide de classer dans un groupe à lui tout seul.“D’emblée, il s’intéresse donc à un animal énigmatique, mais à l’existence prouvée”, souligne à présent le biologiste Benoît Grison (lire ci-contre).
Ami avec Henri Vernes
Après la Libération à Paris, Heuvelmans, amateur de jazz et de Série Noire rencontre l’écrivain Henri Vernes, auteur des "Bob Morane". Devenus amis, tous deux tombent en arrêt un jour de 1948 devant un article du Saturday Evening Post, qui spécule sur la survie de dinosaures à l’époque contemporaine. “On a parlé de cela et il m’a dit : je vais écrire là-dessus, raconte dans le documentaire Henri Vernes. C’est moi qui en quelque sorte, ait porté la cryptozoologie, sur les fonds baptismaux ! ” En effet, en 1955, Bernard Heuvelmans sort le livre “Sur la piste des bêtes ignorées”. Fondé sur d’anciennes traditions orales et littéraires, le livre jette les bases d’une nouvelle science : la cryptozoologie, la science des animaux cachées. Le livre dépasse le million de copies et fait partie des quelques livres d’histoire naturelle qui touchent un large public, comme l’origine des espèces de Darwin ou les oeuvres de Buffon.
"Le migeu"
Sa conviction, comme la précise sa compagne Alika Lindbergh : “Bernard avait énormément de respects pour les populations (indigènes) et voulait absolument prouver que les légendes, les bruits qui couraient sur les animaux inconnus de la science était fondées.” Un de ses grands intérêts, le yéti (ou “le migeu”) qu’il évoquera à la télévision. Il prouve notamment à l’aide d’analyse scientifique, que des scalps, présentés comme ceux de yétis, sont faux. Tout en continuant en continuant à croire à l’existence de l’homme des neiges. “Ce n’est pas parce qu’on fait des faux Vermeer que Vermeer n’a pas existé!”, lance-t-il aux journalistes.
Dans les années 60, Bernard Heuvelmans, à présent devenu animateur de télévision, est au sommet, et un ami zoologiste lui parle d’un “homme sauvage” retrouvé par un forain américain, Frank Hansen. Le 17 décembre 1968, dans un ferme perdue du Minnesota, le Belge se penche sur le cadavre de cet homme singe, d’une race prétendument rescapée de l’ère glaciaire.
Méfiant, le propriétaire refuse toute radiographie, mais Bernard Heuvelmans examine le corps et prend des photos. “C’est stupéfiant, authentique, et complètement inconnu de la science”, écrit-il à Alika. Il juge l’homme comme un Néanderthalien et croit que ses pairs vont reconnaître sa démarche et la cryptozoologie, mais c’est tout l’inverse qui se produit : ils lui tombent dessus, et crient qu’il s’est fait avoir. Bernard Heuvelmans lui assurera jusqu’à la fin de sa vie, que le propriétaire a fait disparaître le véritable cadavre de cette espèce encore vivante de nos jours et fait faire un ‘vrai faux’, un mannequin en latex, pour échapper aux poursuites du FBI, car “l’homme pongoïde” aurait en fait été victime d’un meurtre, lors de la guerre du Vietnam. “Il était du signe de la balance, justifie à présent Henri Vernes. Il avait ce côté précis du scientifique et puis un côté imprécis : son amour pour ce qui était un tout petit peu extraordinaire..."