L'administration Trump est à deux doigts de déclencher une guerre commerciale

Le gouvernement américain veut prendre des mesures protectionnistes sur les importations d'acier et d'aluminium, au nom de la sécurité nationale. La Chine, la Corée du Sud et l'Europe ont fermement réagi.

I.L. (avec agences)
L'administration Trump est à deux doigts de déclencher une guerre commerciale
©BELGA

Vendredi dernier, l'administration américaine a fait savoir qu'elle préparait trois scénarios pour frapper de taxes et de quotas les importations vers les Etats-Unis d'acier et d'aluminium venant d'une douzaine de pays, asiatiques, africains, américains ainsi que la Russie. Et c'est au nom de la sécurité nationale que le gouvernement justifie ces futures mesures protectionnistes. En effet, il invoque la section 232 de sa loi de 1962 sur le commerce, permettant de limiter les importations qui mettraient en cause la sécurité du pays. Après enquêtes, le Département américain du Commerce a conclu que ces importations, dans leur ampleur actuelle (quatre fois plus importantes que les exportations), avaient conduit à la fermeture de nombreuses usines américaines et donc à des pertes d'emplois. Les USA accusent aussi la Chine de pratiquer le dumping et de produire plus que ce que le marché peut absorber.

L'administration Trump prévoit donc trois scénarios protectionnistes.

Acier :

Le premier consisterait à taxer au moins à 24 % toutes les importations, quelle que soit leur provenance.

La deuxième prévoit une taxe minimum de 53 % sur les importations venant de douze pays : Chine, Russie, Corée du Sud, Brésil, Inde, Vietnam, Egypte, Costa Rica, Malaisie, Turquie, Afrique du Sud et Thaïlande. S'y ajouterait un quota par produit pour tous les autres pays, égal à la totalité de leurs exportations vers les Etats-Unis en 2017.

Le troisième scénario, c'est un quota d'importation pour tous les pays équivalent à 63 % de leurs exportations vers les USA l'an dernier.

Aluminium :

Dans la première option, les Etats-Unis taxeraient tous les pays à hauteur d'au moins 7,7 %.

Le deuxième scénario ciblerait la Chine, Hong Kong, la Russie, le Venezuela et le Vietnam, avec une taxe de 26 ,6 % sur tous leurs produits. Pour les autres pays, est prévu un quota égal à l'ensemble de leurs exportations en 2017 vers les Etats-Unis.

Le troisième, c'est un quota d'importation concernant tous les pays de maximum 86,7 % de leurs exportations en 2017.

Décision attendue en avril

L'objectif de ces mesures est, selon le ministre américain du Commerce, de faire remonter la production nationale d'acier, qui passerait de 73 % de ses capacités (taux actuel) à environ 80 %, et d'aluminium de 48 % à 80 %, et atteindre ainsi un seuil de viabilité à long terme. Le président Trump a jusqu‘au 11 avril pour décider d‘imposer ou non ces restrictions sur l'acier et jusqu‘au 20 avril en ce qui concerne l‘aluminium.

Réactions virulentes

Les réactions ne se sont pas fait attendre. Samedi, le ministère chinois du Commerce a indiqué par communiqué que "si la décision finale des Etats-Unis devait affecter les intérêts chinois, la Chine adopterait les mesures nécessaires pour défendre ses droits légitimes". La Chine est particulièrement visée par Donald Trump, qui avait déclaré le 13 février que les industries américaines dans la sidérurgie et l'aluminium avaient été "décimées" par des importations chinoises à prix cassés. "J'ai peur que l'élargissement des restrictions américaines sur nos exportations, y compris l'acier, l'électronique, les panneaux solaires et les machines à laver, ne nuise à nos exportations malgré leur compétitivité internationale", a déclaré lundi le président sud-coréen. "J'aimerais que (les responsables) réagissent aux mesures protectionnistes déraisonnables d'une manière assurée et sévère (....) en vérifiant qu'elles ne violent pas l'accord de libre-échange actuel entre la Corée du Sud et les Etats-Unis", a-t-il ajouté. La Corée du Sud a annoncé qu'elle allait soumettre ce dossier à l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

S'exprimant plus généralement sur les frictions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine, Roberto Azevedo, le directeur général de l'OMC, a évoqué un "risque de guerre commerciale" qui serait "toujours présent".

Ce mardi, le porte-parole de la Commission européenne a affirmé ceci : "Nous sommes prêts à agir rapidement et de manière appropriée au cas où nos exportations seraient soumises à des mesures commerciales restrictives de la part des Etats-Unis. [...] Nous prendrions des mesures appropriées pour défendre l'industrie de l'UE" mais "nous ne sommes pas dans une guerre commerciale", a-t-il tempéré.

Eurofer, l'association des sidérurgistes implantés en Europe, a plaidé dans un communiqué pour que Donald Trump "ne déclenche pas une nouvelle guerre commerciale". Axel Eggert, le patron d'Eurofer, a signalé que "toute restriction des importations d'acier venant d'Europe, au nom de la section 232, saperait le partenariat entre les Etats-Unis et l'Europe", faisant référence au commerce et à l'Otan.

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