La zone du canal veut devenir un exemple en Europe
Le « plan canal » regorge de projets qui s’étendent sur 14 kilomètres le long du canal, à Bruxelles. Une zone qui va changer de visage d’ici à 2025.
Il n’existe aucune autre zone de Bruxelles qui a autant fait parler d’elle que celle dénommée par cinq lettres : le canal. Une zone dont tout le monde s’accorde à dire qu’elle regorge d’innombrables possibilités socio-économiques.
Du canal, on en parle et reparle plus ou moins régulièrement, dans la presse et ailleurs, mais beaucoup s’accordent à dire que si les choses avancent, la progression est lente, trop lente. Et pourtant lorsqu’on franchit les portes de Perspective.brussels, l’entité qui chapeaute avec d’autres acteurs l’avancement des constructions, on se rend un peu mieux compte de l’immensité de la tâche qui occupe depuis des années les différents opérateurs concernés par la bande voisinant cette voie d’eau longue de 14 kilomètres.
Dans une salle de réunion, Tom Sanders, le directeur de la stratégie territoriale, a pris la peine de déployer une multitude de documents sur lesquels on aperçoit différentes formes et couleurs qui correspondent chacune à un projet en cours ou à venir. Impératif pour mieux comprendre les enjeux énormes qui sont regroupés dans une zone portée jadis à bout de bras par Charles Picqué, puis par Rudi Vervoort, l’actuel président de la Région de Bruxelles-Capitale.
L’activation du « plan Canal », le guide de conduite sur lequel repose l’ensemble des travaux, remonte à 2013 lorsqu’a été déclenché le Pras, le plan régional d’aménagement du sol. « Le boom démographique a été le moteur de tout, explique en guise de préambule Tom Sanders. Lorsqu’on a compris que Bruxelles allait devoir construire 100.000 logements d’ici à 2025, les choses se sont accélérées. Beaucoup de personnes estiment qu’on a perdu beaucoup de temps avec le développement du canal. Moi, je ne suis pas aussi catégorique. Si on avait avancé plus vite, on aurait commis des erreurs. Disons que ce retard nous permet aujourd’hui de tirer les leçons des erreurs du passé. Voyez ce qui a été fait le long de la Tamise, à Londres, où l’on a évacué toute trace d’activité économique pour ne se concentrer que sur le seul logement ! »
L’aménagement de la zone du canal repose sur trois piliers fondamentaux : répondre au besoin en logements suite au boom démographique que connaît(ra) la capitale, garder l’activité économique comme moteur de la zone en maintenant les entreprises existantes et en en créant d’autres, et prévoir enfin des espaces publics de qualité. « On s’est battu pour que des entreprises comme Interbeton, située juste en face de Tour et Taxis, l’entreprise de matériaux de construction Gobert ou les ferrailleurs Stevens présents dans le bassin Vergote restent dans la zone, insiste à ce sujet Tom Sanders. C’est impératif si l’on veut faire du canal une nouvelle centralité urbaine où l’on pourra se promener et passer du bon temps dans le futur. Nous aimerions changer l’image de ce territoire de 700 hectares pour le rendre à nouveau attractif. Bien sûr, il reste du chemin à parcourir, mais nous sommes en train de démontrer qu’on peut y arriver. »
Le directeur stratégique en veut pour preuve l’excellente coopération qui préside aux réunions entre les différents intervenants. « Auparavant, certains promoteurs déposaient un permis avant d’entamer les discussions, poursuit notre interlocuteur. Aujourd’hui, les discussions ont lieu en amont. Cela veut dire beaucoup… »
Des mastodontes comme Besix, BPI, AGRE ou encore Atenor (dont la tour Upsite démontre à elle seule l’intérêt porté depuis longtemps par ce promoteur pour le canal) n’hésitent plus à injecter des dizaines de millions d’euros, voire bien davantage, dans une zone de Bruxelles encore très souvent considérée comme glauque et malfamée. « Tout le monde est aujourd’hui conscient des enjeux. Ce qui reste encore parfois compliqué, c’est de convaincre les promoteurs d’inclure l’activité économique dans leurs projets. Ils sont d’accord pour construire du logement, des bureaux et des commerces, mais ça coince encore en ce qui concerne les entreprises, même si nous avons énormément progressé sur ce point. Pour reprendre une expression utilisée par un grand architecte, il faut savoir rester poli et gentil avec le tissu urbain existant », sourit Tom Sanders.
Conçu par l’architecte-urbaniste français Alexandre Chemetov, personnage au caractère bien trempé à qui l’on doit notamment la reconversion de l’île de Nantes et dont la mission bruxelloise s’est achevée il y a deux ans, le plan canal poursuit aujourd’hui lentement mais sûrement sa navigation en eaux désormais claires. « Chemetov était un personnage clivant qui ne s’est pas fait que des amis, mais il a le mérite d’avoir fait bouger les choses, conclut Tom Sanders. Il a amené autour de la table des débats de fond passionnants sur le développement du canal et, par-delà, de Bruxelles. Je suis désormais persuadé que les choses vont progresser vite et bien et que le canal va devenir un modèle de développement pour d’autres villes européennes. Ce n’est pas un hasard si nous avons déjà reçu deux prix ces deux dernières années. »
Il reste huit ans au plan canal pour réussir son pari. Une misère pour certains, une vie pour d’autres…
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