"Un directeur dans une école primaire peut gagner moins qu'un de ses enseignants"
- Publié le 19-10-2018 à 12h46
- Mis à jour le 19-10-2018 à 13h18
Patrick Dekelver est le président de l’Adibra, l’Association des directeurs de l’enseignement secondaire libre de Bruxelles et du Brabant wallon. Comme ses confrères, il sera amené à renvoyer ses considérations à propos du projet de décret. À partir de votre expérience, quel regard portez-vous sur ce projet de décret ?
Je pense que la suppression des paliers qui restreignent l’autonomie des pouvoirs organisateurs (PO) lors de l’engagement des directeurs est une bonne chose. Cela permettra à ces PO d’être en capacité de choisir réellement leur directeur en fonction du profil de l’école et des objectifs qu’elle se donne. Auparavant, avec cette logique des paliers, on pouvait être amené à devoir choisir une personnalité qui ne correspondait pas totalement aux nécessités. Le deuxième élément qui me semble positif est le fait qu’un professionnel du recrutement, extérieur au PO, devra faire partie de la commission de sélection. Cela rendra les processus de recrutement plus professionnels. J’espère par contre que ce décret n’engendrera pas une lourdeur administrative supplémentaire. À l’heure actuelle, c’est la bureaucratie qui tue les directions.
La formation des directeurs sera revue à la hausse, c’était essentiel ?
On va passer de 120 à 180 heures de formation en trois ans et en dehors des heures de travail. Cela me paraît très lourd. Je suis d’autant plus inquiet que l’augmentation du nombre d’heures n’est en rien synonyme de l’augmentation de la qualité. Or la qualité de la formation, interréseaux surtout, est pour l’instant très faible.
Faute de candidats, il est parfois difficile de recruter des directeurs. Vous-même avez déjà évoqué une pénurie . Ce décret sera-t-il à même d’y répondre ?
J’espère que la lourdeur de la formation ne découragera pas des candidats. Au-delà, pour lutter véritablement contre la pénurie, il sera indispensable de revoir le barème, et donc le salaire des directeurs. La Belgique est un des pays dans lesquels la différence de traitement entre les enseignants et les directions est la plus faible. Un directeur, dans une école primaire, peut gagner moins qu’un de ses enseignants si celui-ci a suivi une formation supplémentaire. Et de telles situations pourront être plus nombreuses encore à la suite de la réforme de la formation initiale des enseignants . La donne est simple : si l’on veut attirer des personnes de qualité au poste de directeur, il est indispensable de revoir le barème salarial.
Le prochain décret assouplira les règles de candidatures et n’imposera pas une longue expérience en tant que prof pour pouvoir postuler. Faut-il avoir été prof pour devenir un bon directeur ?
Une expérience de ce que sont la classe et le contact avec les élèves me paraît indispensable.