Le projet de budget italien inquiète les leaders européens
- Publié le 19-10-2018 à 10h59
- Mis à jour le 19-10-2018 à 12h25
Le sujet a été abordé lors du sommet, en attendant l’avis de la Commission.À chaque jour suffit sa peine. Lors de la réunion "Brexit" de mercredi soir, les chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne se sont penchés sur le cas presque désespéré du Royaume-Uni. Jeudi, c’est sur l’Italie, le nouveau trublion européen, qu’ils ont porté leur attention, lors du sommet des leaders de la zone euro.
Le gouvernement italien, dirigé par une coalition réunissant le parti d’extrême droite La Ligue et le populiste Mouvement 5 Étoiles (M5S), a envoyé son projet de budget à la Commission européenne, lundi soir.
Ce projet prévoit que le déficit public de l’Italie sera de 2,7 % du produit intérieur brut en 2019, selon la Commission, alors que le précédent gouvernement s’était engagé envers l’Europe à le maintenir à 0,8 %, afin de respecter la trajectoire de réduction de l’importante dette italienne (132 % du PIB). Or, les Européens redoutent un dérapage des finances publiques de la troisième économie de la zone euro, qui pourrait déstabiliser l’Union économique et monétaire, à peine remise de la crise des années 2010-2015.
"L’Italie n’est pas à l’agenda du sommet de la zone euro de jeudi. Il y a des procédures claires, la balle est dans le camp de la Commission", avait désamorcé une source européenne de haut rang, mardi. "Ce n’est pas aux leaders de rejeter le budget italien", confirmait mercredi une autre source européenne. "Mais je ne vois pas le président de la Commission rester silencieux. Si nous n’en parlons pas, les marchés s’en chargeront."
Pas d’éclat, mais des inquiétudes
La discussion n’a pas dérapé, durant le sommet de la zone euro. "Le Premier ministre italien (Giuseppe Conte) nous a présenté la situation italienne avec talent et avec verve. Nous n’avons pas réagi à son exposé puisque nous sommes en train d’étudier le projet de budget qui nous a été envoyé", a indiqué le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, à l’issue de la réunion.
Le commissaire européen aux Affaires économiques Pierre Moscovici a remis en mains propres au ministre italien des Finances Giovanni Tria une lettre de la Commission demandant des clarifications. Il y est pointé le "risque sérieux de non-conformité" du projet de budget italien "avec les obligations en matière de politiques budgétaires établies par le pacte de stabilité et de croissance". Sans réponse convaincante d’ici deux semaines, la Commission demandera à Rome de revoir sa copie.
Le débat, assurent plusieurs sources, a été bref autour de la table des chefs. Le président Macron a indiqué que la France était mal placée pour faire la leçon, mais certains États membres ont exprimé leur inquiétude, dont le Premier ministre néerlandais Mark Rutte : "Je suis très préoccupé par la proposition italienne, parce qu’elle va à l’encontre du pacte de stabilité. Ils vont augmenter le déficit au lieu de le diminuer. Je ne crois pas que c’est en dépensant qu’on sort de la crise."
Les taux d’intérêt italiens augmentent
"Nous savions que ce budget, pensé pour satisfaire les exigences des citoyens italiens, longtemps ignorées, n’était pas conforme aux attentes de la Commission européenne. Nous nous attendions donc à des observations et des remarques […] auxquelles nous sommes prêts à répondre", a répondu, via Facebook, le Premier ministre Conte. "Nous sommes responsables devant 60 millions d’Italiens, pas devant eux. Le budget ne changera pas d’une virgule", a averti, de Rome, Matteo Salvini, le véritable homme fort du gouvernement.
Pendant ce temps, le spread, l’écart entre le taux d’intérêt italien à dix ans et le taux d’intérêt allemand, a atteint 325 points de base, son plus haut niveau depuis cinq ans.