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L’immobilier belge touché, mais pas coulé, par Lehman Brothers

Nombreux sont ceux qui s’en souviennent comme si c’était hier. Il y a dix ans, la crise financière a laissé des traces profondes sur les marchés financiers mais aussi, et peut-être surtout, sur les marchés immobiliers. En Belgique, elle a fait moins de dégâts qu’ailleurs.

Temps de lecture: 5 min

Tout semblait sous contrôle et puis, subitement, la machine s’est grippée. Comment expliquer la faillite de Lehman Brothers, qui remonte à tout juste dix ans et dont on mesure aujourd’hui les répercussions qu’elle a eues pendant longtemps sur le monde entier ?

Les spécialistes parlent d’une combinaison de différents facteurs, mais il y a au tout début, plus personne ne l’ignore aujourd’hui, ces fameux subprimes américains dont la planète entière connut l’existence au moment des faits. En gros, les USA ont assisté à un emballement des prix de l’immobilier dû à l’octroi de crédits et d’avantages fiscaux à des personnes à faibles revenus ou revenus instables, qui n’avaient pas les garanties normalement requises pour avoir accès au crédit hypothécaire. « Un jour, on s’est rendu compte que les prix avaient trop monté et que les défauts étaient significatifs, explique Etienne de Callataÿ, économiste, administrateur de l’organisme de gestion financière Orcadia Asset Management. Ces crédits étaient des produits assez pervers. Les premières années, les gens ne remboursaient pas le principal. C’est très différent de notre système de crédit hypothécaire où on rembourse dès le début les intérêts hypothécaires et une partie du capital. Aux Etats-Unis, dans cette formule de prêts subprimes, on disait aux gens : “Endettez-vous, au début vous ne devez pas rembourser le capital et vous bénéficiez d’un taux de faveur.” Tablant sur leur optimisme, l’idée était que deux ou trois ans après, ils auraient des revenus plus élevés. On a accordé des crédits beaucoup trop attractifs à des personnes qui n’avaient pas les moyens d’emprunter. »

L’Europe embarquée dans la tourmente

Et puis il y a eu l’effet boule de neige. La plupart des observateurs financiers ont ignoré le fait que des banques européennes étaient sensibles à ce qui se passait aux Etats-Unis et avaient investi dans ce type de produits structurés, saucissonnés, hautement spéculatifs. Cette crise a déteint sur l’Europe et la Belgique avec des conséquences importantes sur le marché de la construction et de l’immobilier. Un ralentissement conjoncturel s’est manifesté. « Quand l’activité recule, quand les faillites et le chômage augmentent et que l’on est confrontés à un resserrement du crédit hypothécaire, les gens n’ont vraiment pas envie de se lancer dans des projets de rénovation lourde ou de nouvelles constructions », poursuit Etienne De Callataÿ.

Conséquence : l’attitude des banques qui, sous la contrainte du régulateur, ont resserré les boulons de l’octroi de crédit. « Avant la crise, les banques prêtaient 100 %, parfois 110 %. Actuellement, le pourcentage de fonds propres que les promoteurs doivent mettre sur la table pour réaliser leur(s) projet (s) immobilier(s) a augmenté. Il est de 20 à 30 % alors qu’à l’époque, il était de maximum 10 %. Le financement est donc devenu plus cher. Les règles bancaires ont changé et le professionnalisme du secteur s’est accru au cours de ces dernières années, explique pour sa part Olivier Carrette, administrateur délégué de l’Upsi qui représente les promoteurs. Quant au particulier, il doit lui aussi mettre une mise de départ de 15 à 20 % et doit fournir des preuves de solvabilité importantes (NDLR : contrat d’embauche, montant sur son compte en banque…). On n’emprunte plus aussi facilement qu’avant. »

Les leçons à tirer

Pour Robert de Mûelenaere, administrateur délégué de la Confédération Construction, le marché de l’immobilier en Belgique est sain et il l’est également resté au cours des années de crise qui ont suivi 2008. « La bonne tenue de la construction belge apparaît vraisemblablement liée à différents facteurs : les bonnes performances de l’économie belge, elle-même partiellement imputable à la bonne tenue de la construction, le maintien du revenu disponible, une évolution du chômage pas trop défavorable, l’absence de flambée des taux hypothécaires et l’adoption de mesures de soutien à l’économie axées sur la construction (NDLR : TVA temporairement réduite sur le logement neuf, élargissement temporaire du champ d’application de la TVA réduite pour la démolition-reconstruction, élargissement temporaire des mesures de soutien à la rénovation énergétique). »

La crise de 2007-2008 a rappelé que l’investissement immobilier est un investissement à risque. « Dans certains Etats américains, on a vu le prix moyen des maisons chuter de 50 %, ajoute Etienne de Callataÿ. Cela veut dire que pour certains biens, la baisse atteignait même les 60, voire les 70 % ! On aurait pu imaginer que cela allait changer la perception que les gens avaient de l’immobilier, que ce n’était pas un placement sûr, mais je n’ai pas l’impression que cette image-là ait percolé, en tout cas pas dans notre pays. »

Contrairement à d’autres marchés plus cycliques comme ceux de Paris, Londres, Shanghai ou New York, le marché immobilier belge est un marché relativement stable. Il est d’ailleurs considéré par certains investisseurs étrangers comme un « boring market » (marché ennuyeux).

Mais attention, relève un expert : « Dans notre métier, il y a beaucoup de spéculateurs, de joueurs, de preneurs de risques. On constate heureusement que dix ans après, certains ont disparu. Mais on ne peut s’empêcher de faire le parallèle avec ce qui se passe maintenant. Certains acteurs sont en train de prendre de gros risques, notamment vu les faibles taux d’intérêt, avec tous les dangers que cela comporte. L’histoire pourrait très bien se répéter pour eux… »

Prudence donc…

 

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