Moqtada al Sadr et Hadi al Ameri cheminent vers le gouvernement irakien
- Publié le 18-09-2018 à 10h44
- Mis à jour le 18-09-2018 à 10h45
Le poste de Premier ministre ne devrait plus échapper au bloc chiite composé par les deux vainqueurs des élections.L’Iran a salué dimanche l’élection du président du parlement irakien et de son premier adjoint. C’est dire si le bloc parlementaire chiite qui a appuyé les deux candidats élus au perchoir, et qui se positionne idéalement en vue de former un futur gouvernement, donne tous ses apaisements à Téhéran.
La présidence de la chambre des députés revient à Mohammed al Halboussi, un sunnite de 37 ans (le plus jeune président du Parlement en Irak) qui était gouverneur de la province d’Anbar (ouest) - en vertu d’une règle constitutionnelle de répartition confessionnelle du pouvoir. Le premier siège de vice-président échoit à Hassan Karim, l’ancien maire de Sadr City, un district de Bagdad connu pour être le bastion du religieux chiite Moqtada al Sadr.
Après moult configurations depuis le scrutin du 12 mai, la coalition formée principalement par la Marche pour les réformes, l’alliance de Moqtada al Sadr, victorieuse des élections, et de l’alliance de la Conquête de Hadi al Ameri, arrivée deuxième, a dès lors pris une bonne option pour décrocher le poste de Premier ministre - bien que ce dernier ait dit ne pas être candidat.
Abadi affaibli, avant de rempiler
Si le premier, un chiite nationaliste, est connu pour sa posture très autonomiste vis-à-vis de l’Iran voisin, le second est réputé proche de l’Iran en tant que chef de Badr, une organisation politico-militaire qui veut instaurer un régime analogue à celui du grand voisin chiite et qui s’est jointe aux Unités de mobilisation populaire (Hachd al Chaabi) ayant mené la lutte armée pour libérer l’Irak de l’emprise de l’État islamique (Daech).
Au début du mois, l’alliance de Moqtada al Sadr était encore arrimée à celle du Premier ministre sortant, Haider al Abadi. Mais l’incapacité de cet islamiste chiite à régler la récente crise à Bassora, la grande ville pétrolière du sud du pays, semble avoir définitivement fait perdre toutes ses chances à ce dernier de conserver son poste pour un second mandat d’affilée. La deuxième ville d’Irak connaît depuis une quinzaine de jours des émeutes meurtrières sur fond de corruption et d’incurie.
Conséquences pratiques : Moqtada al Sadr a lâché il y a dix jours Haider al Abadi. Quant au protégé de celui-ci, l’ex-ministre de la Défense Khaled al Obeïdi, il a échoué au perchoir de la Chambre des députés.
Les cartes sont rebattues
Surtout, la prise de position du grand ayatollah Ali al Sistani, une autorité religieuse et morale dont la parole est très écoutée, a contribué à rebattre les cartes dans cette fragile séquence politique, neuf mois après que Bagdad a restauré son autorité sur l’ensemble du territoire irakien. Dans une lettre ouverte publiée la semaine dernière, l’ayatollah Sistani s’est prononcé pour des politiciens capables de lutter avec intégrité et courage contre les maux qui ravagent le pays.
Il s’est aussi défendu de propos qu’on lui avait attribués, selon lesquels il cite nommément les politiciens n’ayant pas leur place à la tête de l’exécutif : Haider al Abadi, son prédécesseur Nouri al Maliki, Hadi al Ameri, de même que l’ancien chef de la mobilisation populaire et un cadre de Dawa, le parti islamiste pro-iranien, et proche de Maliki. Mais l’épisode en dit long sur les manigances en cours dans un Irak perclus depuis des années de contestations contre l’incurie des autorités, le manque et l’inefficacité criante des services publics. C’est en portant ces revendications au rang d’enjeu que l’alliance de Sadr est arrivée première aux élections. Et semble désormais bien placée pour obtenir le poste de Premier ministre.