L'armée belge vient de s'apercevoir que son stock de munitions a dangereusement baissé. A la suite d'une erreur dans la procédure d'achat, aucune commande n'a été faite pour regarnir les bandoulières.
Un général fit le calcul : d'ici 2012, chaque soldat n'a plus droit qu'à quatre cartouches. Ce n'est pas trop grave pour les piou-pious stationnés en Belgique : on n'en est pas encore à tirer sur la foule (quoique ça ne saurait tarder vu le climat délétère, mais avec un peu de bonne volonté on peut attendre 2012).
Mais pour ceux qui combattent en Afghanistan, c'est un peu plus ennuyeux.
On nomma donc une commission qui trouva la parade suivante : au lieu de tirer, nos héroïques soldats crieraient 'pan-pan', ce qui terroriserait les Talibans et les mettrait en débandade.
Oui mais... Crieraient-ils 'pan-pan' en français ou en flamand ? Grave question.
Les Flamands de la commission firent une proposition : on crierait en néerlandais les jours impairs et en français les jours pairs. Chacun se félicita de cette solution équilibrée jusqu'à ce qu'un Wallon futé décèle le piège horrible : dans une année normale, il y a deux jours impairs de plus que de jours pairs.
On se crêpa le chignon toute la nuit et enfin au petit jour, on convint qu'un coefficient correcteur serait appliqué en début août afin de balancer les jours manquants : on crierait en français un jour impair le nombre de minutes suffisantes pour corriger l'injustice.
Mais la proposition de la commission fut rejetée par le ministre des Armées.
Car si les Talibans n'attaquaient que les jours pairs, et ils en seraient bien capables, ces affreux, alors on crierait plus en français qu'en néerlandais, car enfin, on ne peut demander à nos soldats de crier en l'absence de l'ennemi. Et tout l'équilibre linguistique serait compromis.
Une autre commission proposa de compter le temps réel des escarmouches.
Le coefficient correcteur serait alors appliqué semaine après semaine en fonction des cris réellement poussés. Bien sûr, il faudrait adjoindre à chaque unité un contrôleur linguistique qui, légèrement en arrière de l'action, chronométrerait les événements.
Cette fois-ci, c'est le ministre des Finances (un abominable francophone) qui refusa : le coût de ces contrôleurs linguistiques serait trop élevé et en tout cas n'est pas budgété. La presse fustigea le ministre qui refusait une dépense pourtant tout à fait justifiée pour faire régner la paix linguistique.
Ce fut un fonctionnaire sous-payé qui trouva l'oeuf de Colomb.
Le premier 'pan' serait en néerlandais, le second en français. Ainsi la parité serait tout à fait respectée.
Et il en fut ainsi.
La tactique se révéla payante car il paraît que tous les Talibans de la zone belge sont morts de rire.